Mas d'Eole
  sep  

PREFACE



En abordant ce livre, probablement vous êtes-vous exclamé, quelque peu blasé de l’abondance d’ouvrages sur le sujet : « Encore un ! Quelle prétention ! ». Réaction compréhensible, certes, mais prématurée.

Accordez-lui au moins le bénéfice du doute. Vous ne le regretterez pas, car : oui, c’est un récit de plus sur le Chemin de Compostelle ; mais, non, ce n’est ni un livre d’histoire, ni un livre d’architecture, ni un guide de voyage, ni un ouvrage de prosélytisme religieux, ni une épopée bucolique.
L’auteur ne prétend pas non plus faire œuvre littéraire. Et heureusement, car c’eût été au détriment de la spontanéité et de l’authenticité.

Nous avons donc là quelque chose d’autre. En effet, ici pas de forfanterie, de pédantisme, de grandiloquence ; nous sommes au cœur du quotidien du pèlerin : les multiples soucis de tous ordres, les problèmes matériels, les imprévus, le gîte et le couvert, les aléas, les vicissitudes, les bobos, les états d’âme, les joies, les grandes émotions, le dépassement de soi. Bref, nous sommes plongés dans le réel le plus brut. Car, Gaston ne dissimule rien, n’enjolive rien. Mais, au-delà de cela, il y a aussi, et surtout, les rencontres ; car c’est là qu’il excelle, là qu’il se révèle et là aussi qu’il nous fait percevoir – autant que faire se peut – la « magie » du Chemin.

Et c’est précisément en cela que réside ce « quelque chose ». Car, ce récit resterait anecdotique s’il n’était épicé, « relevé », par la verve toute méridionale de l’auteur. Gaston, en effet, écrit comme il parle ; et il s’y entend pour faire chanter les mots. C’est ce qui confère à ce livre son incomparable accent de vérité.

Cette « mayonnaise », concoctée à partir de deux ingrédients - le vécu et la truculence -, a merveilleusement pris. Car, in fine, il se dégage de ce récit, chemin faisant, sans en avoir l’air, en filigrane, le portrait de quelqu’un qui, sans s’ériger en donneur de leçons, incarne assez bien l’esprit du Chemin de Compostelle et les qualités qu’il requiert : persévérance, esprit de dépassement, foi en demain, sens de la fraternité ; bref, une sorte d’héroïsme du quotidien, auquel nous aspirons tous.

Jean Michel Beloeil.